Quel message portez-vous au sein du comité de pilotage de L’Initiative ?
L’Initiative a développé des outils et des expertises adaptées aux problématiques spécifiques de la société civile.
Les représentantes et les représentants de la société civile membres du comité de pilotage œuvrent tout particulièrement pour que la santé communautaire ait une vraie place, pour que la voix des personnes concernées soit entendue et prise en compte dans les réponses aux trois pandémies. Ce message est bien reçu par L’Initiative : la composante communautaire est désormais intégrée dans la plupart de ses actions. L’Initiative a développé des outils et des expertises adaptées aux problématiques spécifiques de la société civile. Elle organise par ailleurs régulièrement des webinaires et des conférences sur ce sujet.
Quelle est l’histoire et quels sont les objectifs du réseau Grandir ensemble, soutenu par Sidaction ?
En 2005, Sidaction a participé à la mise en œuvre du programme Grandir, qui visait à renforcer et soutenir le développement de la prise en charge pédiatrique du VIH/sida dans onze pays d’Afrique de l’Ouest, d’Afrique centrale et à Djibouti. Réunissant dix-huit organisations membres, ce programme, financé à l’époque par l’Agence française de développement, représentait une file active d’environ 6 000 enfants, adolescentes et adolescents. Au regard des résultats probants obtenus, il a donné naissance en 2017 au réseau Grandir ensemble. Ce réseau regroupe actuellement des associations d’onze pays francophones – six sont plus particulièrement ciblés dans le projet financé par L’Initiative (Bénin, Burkina Faso, Burundi, Cameroun, Côte d’Ivoire, Djibouti, Congo, République démocratique du Congo, Mali, Tchad, Togo) – et vise à défendre et à promouvoir l’expertise de ses membres, tout en stimulant une réponse globale et efficace à la prévention et à la prise en charge du VIH/sida chez les enfants, les adolescentes et les adolescents.
Le réseau assure notamment le renforcement de la capacité des soignants (agents de santé communautaire et du secteur public), rédige des documents stratégiques nationaux, met en place des référents dans les différentes régions des pays concernés. Le but est de réduire la morbi-mortalité des jeunes vivants avec le VIH/sida, tout en renforçant leur leadership et leur implication dans la lutte contre la pandémie.
Sidaction, qui organise les formations avec les associations membres du réseau, met en œuvre ce renforcement de capacités financé par L’Initiative depuis le lancement du réseau. Nous voulons faire reconnaître l’expertise communautaire et l’intérêt de la paire-éducation en matière de prise en charge des enfants, des adolescentes et des adolescents touchés par le VIH et faire en sorte qu’ils soient systématiquement intégrés dans les programmes nationaux de lutte contre la pandémie.
Grandir ensemble donne aussi aux jeunes et aux adolescents vivant avec le VIH l’opportunité de faire entendre leur voix dans un contexte francophone où elle a longtemps été étouffée, en raison de structures d’accompagnement insuffisantes et de discriminations qui perdurent.
Qu’est-ce que la paire-éducation – ou éducation par les pairs – portée par le réseau Grandir ensemble ?
Les pairs-éducateurs sont des jeunes, eux-mêmes vivant avec le VIH, formés à la prise en charge psychosociale, à la prévention et à l’accompagnement des autres jeunes vivant avec le VIH. Ce sont des référents que les jeunes de la même tranche d’âge peuvent solliciter et qui participent à l’amélioration de l’offre de services en épaulant ou en prenant le relais des soignants. Leur rôle est par exemple très important dans l’accompagnement à l’annonce de la maladie, qui est toujours un moment charnière avec des difficultés spécifiques dans le cas des jeunes, notamment d’ordre psychologique ou liées à la santé sexuelle.
En outre, certains de ces jeunes sont formés au plaidoyer dans le but de les associer aux décisions qui concernent la santé et la prise en charge des adolescentes et des adolescents. Une des ambassadrices du réseau Grandir ensemble, Amanda Dushime, est ainsi montée à la tribune en compagnie d’Emmanuel Macron lors de la 6e Conférence de reconstitution du Fonds mondial à Lyon en octobre 2019. Du haut de ses 18 ans, elle a porté la parole de ces jeunes personnes vivant avec le VIH et évoqué les discriminations qu’elles subissent.
En quoi le rôle de ces acteurs communautaires est-il fondamental ?
Dans des pays où les systèmes de santé sont encore fragiles, les associations communautaires sont souvent le premier accès aux soins pour les personnes de la communauté
Ces associations permettent à l’ensemble des populations d’être informées et dirigées vers des structures de prise en charge dédiées. Par exemple, la plupart des associations communautaires sur le VIH proposent aujourd’hui des systèmes de référencement pour la tuberculose très efficaces.
On l’a vu également avec la Covid-19 : les associations communautaires VIH ont été en première ligne dans la sensibilisation et l’accès au dépistage. En outre, en décloisonnant le sanitaire et le social, elles œuvrent à changer la vision purement médicale de la santé plus souvent portée par les institutions. Cette approche, qui envisage les bénéficiaires des systèmes de santé dans toutes les dimensions de leur humanité, est fondamentale dans la prise en charge des patients, particulièrement dans la lutte contre les pandémies.