Quels sont les grands enjeux de la lutte contre la tuberculose ?
La tuberculose est une maladie de la pauvreté : la promiscuité, la malnutrition et les conditions de vie insalubres favorisent le réveil du bacille et le déclenchement de la maladie. Il faut rappeler qu’elle est évitable et qu’elle peut se soigner dans la grande majorité des cas grâce aux traitements antibiotiques antituberculeux. Pour autant, elle était la maladie infectieuse la plus meurtrière à l’échelle mondiale avant la Covid-19. Pourquoi ? Parce ce qu’elle touche les populations défavorisées et vulnérables des pays les plus pauvres et que les ressources déployées dans ces pays à forte incidence de la maladie sont loin d’être suffisantes. Ce scandale sanitaire est une tragédie pour les millions de personnes atteintes.
Quels sont les messages portés par Global Health Advocates (GHA) sur la tuberculose ?
En 2018, les pays développés ont pris des engagements lors d’un sommet des Nations unies à New York. Il s’agissait spécifiquement de traiter 40 millions de personnes atteintes de tuberculose avant 2022, de mettre un terme à la pandémie avant 2030 et de lever 15 milliards de dollars par an pour la recherche et le développement afin d’atteindre cet objectif. Deux ans après, faute de volonté politique réelle, force est de constater que les investissements ne sont pas à la hauteur des engagements. De surcroît, douze mois de pandémie de Covid-19 nous ont fait perdre douze ans d’avancée dans la lutte contre la tuberculose selon les dernières données publiées par le partenariat Halte à la tuberculose.
Le problème, c’est que la tuberculose intéresse peu l’industrie pharmaceutique. Pourtant, dix millions de nouveaux cas par an selon l’OMS devraient suffire à justifier de lourds investissements pour renouveler les outils de traitement, obsolètes pour la plupart, en particulier face à la forme multirésistante de la maladie. Quant au vaccin BCG, développé en France il y a près de cent ans, on sait aujourd’hui qu’il n’est pas efficace chez l’adulte. Sans compter qu’une stratégie de lutte contre la stigmatisation des personnes infectées et pour le droit de patients reste aussi à construire.
Quelle est la plus-value de L’Initiative dans la lutte contre la tuberculose ?
Je pense qu’elle contribue à construire des réponses novatrices aux trois grandes pandémies et à en renforcer les effets sur les populations, notamment sur le plan communautaire, une dimension peu prise en compte par les États. Le rôle de L’Initiative est donc essentiel, d’autant plus que la tuberculose est encore le parent pauvre des trois grandes pandémies.
« L’Initiative contribue à construire des réponses novatrices aux trois grandes pandémies et à en renforcer les effets sur les populations, notamment sur le plan communautaire, une dimension peu prise en compte par les États. »
Comment L’Initiative pourrait-elle aller plus loin ?
L’Initiative a appuyé ou rendu possible de nombreux projets novateurs sur le terrain. Il faut le faire savoir ! Pour moi, l’effort doit être porté sur la sensibilisation aux actions de L’Initiative et sur son utilité concrète dans la réponse. L’Assemblée nationale vient d’adopter, en première lecture, une loi sur le développement qui grave dans le marbre l’importance de la lutte contre les trois pandémies et une augmentation des budgets de l’aide publique au développement qui y sont consacrés. À nous d’adopter un plaidoyer adéquat pour que la lutte contre la tuberculose ne soit pas une nouvelle fois la plus mal servie.
Le comité de pilotage a demandé à L’Initiative de travailler sur la question de la rémunération des acteurs de santé communautaire. Pourquoi avoir formulé cette demande ?
Les maladies infectieuses, et particulièrement la tuberculose, sont étroitement liées aux déterminants sociaux de la santé, à savoir les conditions dans lesquelles on vit et on travaille. De ce point de vue, les organisations communautaires jouent un rôle déterminant : elles permettent d’atteindre les populations ciblées jusque dans les zones les plus reculées, de les sensibiliser aux bonnes pratiques d’hygiène, de repérer les cas contacts et de lutter contre la stigmatisation pour que les malades ne soient pas rejetés et acceptent de se soigner. Pour toutes ces raisons, leur travail mérite d’être davantage reconnu. C’est même une nécessité. Il faut renforcer leur formation, et leur accorder une juste rémunération pour qu’ils acquièrent un véritable statut. Il y a là un véritable enjeu pour un passage à l’échelle dans la lutte contre la tuberculose.