Lutter contre la tuberculose au Mozambique
En 10 ans, le nombre de décès lié à la tuberculose a été divisé par trois au Mozambique. Pourtant, le pays reste l’un de ceux où l’incidence de la maladie est parmi les plus élevées au monde : 121 000 cas recensés en 2023. Les défis posés par la pandémie sont nombreux dans ce pays d’Afrique australe : accès aux diagnostics et aux traitements, tuberculose infantile, santé des soignants. À travers son soutien à plusieurs projets, L’Initiative se mobilise pour faire reculer sur le terrain cette maladie infectieuse, la plus meurtrière au monde.
Cyclones, inondations, sécheresses frappent le Mozambique et ses 33,6 millions d’habitants, très touchés par le changement climatique. Un regain de violence affecte également le pays à la suite des élections présidentielle et législative d’octobre 2024, entachées d’irrégularités, selon les observateurs internationaux et locaux. Les troubles s’accumulent, le pays s’enfonce dans la crise.
L’un des pays les plus affectés au monde par les pandémies
Le Mozambique fait partie des nations les plus pauvres et les plus durement touchées par les pandémies dans le monde. La prévalence du VIH est très élevée : 11,5 % des Mozambicains âgés de 15 à 49 ans vivent avec le virus. « Couplé à l’extrême pauvreté, le VIH est l’un des facteurs majeurs de prévalence de la tuberculose, qui représente la première cause de décès chez les patients co-infectés », explique le docteur Thomas Mourez, conseiller régional en santé mondiale (CRSM) pour l’Afrique australe, en poste à l’Ambassade de France en Afrique du Sud, au Lesotho et au Malawi. « Soigner ces patients est une gageure. Le Mozambique est un grand pays de 800 000 kilomètres carrés et les services de santé sont trop peu développés dans les provinces éloignées de la capitale, Maputo », poursuit le virologue. La mobilisation du Fonds mondial et des organisations de santé a permis de faire chuter le nombre de morts liés à la tuberculose, notamment grâce à la multiplication par 7 en dix ans du nombre de personnes mises sous traitement antirétroviral. Malgré tout, les populations privées de soins demeurent trop nombreuses. Dans le cas de la tuberculose, le manque de personnels de santé bien formés et compétents est criant.
« Le dépistage de la tuberculose est parfois défaillant au Mozambique : les populations les plus touchées ne sont pas toujours celles qui ont le meilleur accès au dépistage », indique le docteur Mourez. Les premiers à en pâtir sont les enfants qui ne sont pas correctement pris en charge par les systèmes de santé existants. Or un diagnostic précoce peut sauver des vies et limiter la transmission de l’épidémie.

La technologie au service de la lutte contre la tuberculose infantile
Pour intensifier la réponse au défi majeur qu’est la tuberculose pédiatrique, L’Initiative soutient des projets focalisés sur de nouvelles approches de dépistage et de traitement, à l’instar du projet TB-Speed porté par l’université de Bordeaux. Un autre projet engagé par les équipes universitaires bordelaises, eHealth4ChildTB, est financé par L’Initiative depuis juillet 2024. Son but : améliorer la prise en charge de la maladie chez les enfants grâce à une meilleure application des recommandations de traitement de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
L’un des axes du projet est la décentralisation des services du Programme national de lutte contre la tuberculose vers des structures de proximité, grâce à des outils numériques innovants. « Le déploiement de ces nouveaux outils technologiques offre une solution pour pallier le manque criant de médecins correctement formés dans les zones éloignées de la capitale », expose le docteur Mourez. Concrètement, des appareils mobiles de radiologie pulmonaire, directement reliés à des serveurs centralisés et adossés à des programmes d’intelligence artificielle, vont être déployés sur le terrain. Ils pourront être emportés partout dans le pays et permettront de transmettre les radios effectuées localement à un centre de référence unique, où les radiologues analyseront à distance ces images. À terme, l’ambition est que les équipes sur le terrain fournissent le traitement sans délai, dès le diagnostic radiologique confirmé, en respectant systématiquement les algorithmes de dépistage définis par l’OMS. Grâce à cette prise en charge complète, en un temps réduit, les jeunes patients nécessitant un traitement adapté ne seraient pas perdus de vue.

S’engager pour la santé des soignants
Au Mozambique, L’Initiative s’investit aussi pour la santé des soignants et soignantes à travers le projet Health to Healthcare Workers, aux côtés de la Fundação Aurum. « L’hypothèse de départ est que les personnels de santé seraient plus exposés à la tuberculose et plus à risque d’être contaminés, car ils sont en contact régulier avec des malades. Avec ce projet, l’objectif est d’améliorer la prévention et les services de santé au travail qui leur sont offerts », signale le CRSM.
Déployé dans la province de Gaza et dans le sud du Mozambique, Health to Healthcare Workers se base sur le recrutement et la formation d’équipes d’hygiène spécialisées dans le contrôle de la tuberculose, parmi les personnels de santé de la province. Ces équipes se rendront dans les établissements sanitaires des 14 districts de la zone pour effectuer des dépistages périodiques de la tuberculose et d’autres maladies, comme le VIH ou le diabète, chez les personnels de santé. Grâce à ces tests, le ministère de la Santé mozambicain recueillera de précieuses données sur l’incidence de la maladie ainsi que sur l’accessibilité et la faisabilité du dépistage chez les soignants. Une enquête auprès des soignants sera également menée sur la faisabilité et l’acceptabilité du dépistage de la tuberculose et d’autres interventions de dépistage en matière de santé. Toutes ces informations participeront à l’élaboration et la mise en œuvre du plan stratégique national de santé au travail chez les soignants.
La tuberculose, au Mozambique, comme ailleurs, relève d’un cruel paradoxe : des traitements efficaces existent pour endiguer la maladie, mais ne sont pas accessibles, faute d’un accès équitable au diagnostic et aux soins. Par le soutien aux technologies et aux stratégies innovantes en matière de dépistage et de prise en charge, L’Initiative soutient ses partenaires pour enrayer la propagation de la maladie.